Jusqu’à 70 watts perdus à vélo à 0°C : le test qui change tout en hiver

À retenir : La perte de watts à vélo en hiver est réelle, mesurable et multi-factorielle : pneus durcis, vêtements moins aérodynamiques et air plus dense s’additionnent. Un test terrain autour de 0°C montre jusqu’à 70 W d’écart par rapport à 15°C à watts produits identiques. Comprendre ces résistances permet d’ajuster matériel et attentes de performance hivernale.

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Performance hivernale à vélo : pourquoi la vitesse baisse à watts égaux

La sensation d’être « collé à la route » quand le thermomètre frôle 0°C n’a rien d’illusoire. Cette baisse de rendement à vélo en hiver a une cause mécanique : plusieurs résistances au mouvement augmentent simultanément quand la température chute. Résultat, à puissance développée identique, la vitesse recule et la fatigue apparaît plus vite. Un test terrain mené autour de 0°C a permis de quantifier précisément cette perte de watts à vélo en hiver en conditions réelles, et d’objectiver ce que de nombreux routiers ressentent sur le terrain.

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Le froid modifie la signature énergétique du cycliste et de son vélo via trois leviers principaux.

  1. Le coefficient de roulement grimpe car les pneus se durcissent,
  2. l’aérodynamique se dégrade avec les vestes et couches thermiques,
  3. et la densité de l’air augmente, amplifiant la traînée.

Additionnées, ces résistances pèsent sensiblement sur la vitesse, surtout à partir d’un rythme soutenu. Le test réalisé montre que l’addition peut atteindre 60 à 70 watts entre 0°C et 15°C, sans baisse de la puissance réellement produite par le cycliste.

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Méthodologie du test terrain Bike Speed Lab : Lons-le-Saunier, 0°C à 15°C

Les mesures ont été conduites dans le Jura, à Lons-le-Saunier, avec la technologie Bike Speed Lab développée par Aeroscale. L’objectif était d’éviter les extrapolations et de se concentrer sur des écarts mesurés en extérieur, sur route, à matériel constant et posture comparable. Deux fenêtres de mesures ont été exploitées : une première autour de 0°C, puis une seconde lors du redoux, d’abord vers 8–9°C, enfin jusqu’à 15°C. Cette approche « A/B » sur le terrain permet d’isoler l’effet de la température sur les résistances au déplacement, à vitesse et puissance contrôlées.

Bike Speed Lab s’appuie sur des runs répétés et instrumentés pour extraire les composantes de traînée et de roulement en conditions réelles. La méthode, reproductible, permet de multiplier le nombre d’essais sur une demi-journée et d’atteindre une précision inférieure à 1 watt sur les mesures de roulement.

Contrairement à une soufflerie, le vélo n’est pas figé : les micro-oscillations, l’irrégularité des flux et les petites variations d’angle de vent relatif sont intégrées dans l’analyse, ce qui reflète fidèlement ce que vit un cycliste dehors.

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Pneus et froid : quand le coefficient de roulement augmente

Premier levier de perte de rendement en hiver : le roulement. La gomme et les carcasses deviennent plus rigides à basse température. La déformation cyclique du pneu au point de contact avec la route absorbe davantage d’énergie, ce qui se traduit par une hausse du coefficient de roulement. Cette hausse est directement antiproportionnelle à la vitesse moyennant la puissance nécessaire pour maintenir l’allure : plus on va vite, plus chaque petite augmentation de résistance coûte cher en watts.

Les mesures indiquent qu’à 45 km/h, l’écart de puissance imputable au roulement entre 0°C et 15°C représente typiquement 10 à 15 watts, avec un effet particulièrement marqué sous 5°C. Le phénomène est amplifié lorsque le pneu contient davantage de matière : carcasses épaisses, gros renforts, ou associations pneu/chambre d’air moins souples. La température influe donc autant sur la viscoélasticité de la gomme que sur la capacité de la carcasse à se déformer finement sans dissiper de l’énergie.

Pour les cyclistes, cela implique que l’optimisation hivernale ne se résume pas à la pression. Le choix du modèle et de la construction du pneu, la section retenue et la chambre d’air (2 ou 3 watts dan mon cas précis) ou le montage Tubeless jouent sur la souplesse dynamique du système. En hiver, un pneumatique au comportement fluide et une association minimisant les pertes internes aident à contenir la hausse de Crr, même si celle-ci ne peut être totalement annulée quand le mercure approche 0°C.

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Vêtements d’hiver et aérodynamique : l’impact du CdA se voit au wattmètre

Deuxième facteur, souvent sous-estimé : l’aérodynamique des tenues. Les vestes d’hiver, les couches intermédiaires et les tissus épais modifient le profil du cycliste et perturbent l’écoulement, augmentant le coefficient de traînée aérodynamique, ou CdA. Même en conservant une position identique, le simple passage à une tenue d’hiver peut devenir le principal poste de pertes à allure soutenue.

Sur mon test terrain, la différence liée au choix de la veste atteint jusqu’à 30 watts selon les vitesses et les modèles. Cela peut monter jusqu’a 40 watts. Cette pénalité croît avec l’allure, car la puissance nécessaire pour vaincre la traînée aérodynamique augmente de manière proportionnelle au cube de la vitesse.

L’enjeu est donc de trouver un compromis entre protection thermique et efficience aérodynamique : rester au chaud sans ajouter de turbulences inutiles. Un vêtement qui claque, qui forme des poches d’air ou des plis marqués pénalise nettement plus qu’un textile ajusté et stable dans le flux.

La leçon est simple : la tenue d’hiver fait partie intégrante du système aérodynamique. À watts produits identiques, deux vestes peuvent créer un différentiel tangible de vitesse, surtout au-delà de 30 km/h. Cela ne signifie pas qu’il faut sacrifier la protection thermique, mais que le choix des textiles et de leur ajustement mérite la même rigueur que celui d’un casque aéro ou d’un poste de pilotage.

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Air froid et densité : une traînée plus forte à vitesse égale

Le troisième paramètre est purement physique : la densité de l’air. Quand la température baisse, l’air se densifie, et la traînée aérodynamique augmente à vitesse donnée. Entre 0°C et 15°C, la densité de l’air progresse d’environ 5 à 6 %, ce qui se traduit, toutes choses égales par ailleurs, par des watts supplémentaires à fournir pour conserver la même vitesse.

Sur le terrain, ce surcoût est visible au compteur de puissance : à vitesse constante, l’écart lié à la densité atteint jusqu’à 15 watts. Cette composante est incompressible, car elle dépend des conditions atmosphériques. On peut adapter son équipement et sa posture, mais ni le cycliste ni le vélo ne peuvent « annuler » l’air plus dense d’une matinée glaciale. Là encore, plus l’allure est élevée, plus l’effet est sensible.

Une addition de résistances : comment on arrive entre 60 et 70 watts

Pris isolément, chaque facteur pourrait sembler marginal, mais l’hiver les cumule. En mettant bout à bout les effets mesurés sur le test terrain, on obtient un ordre de grandeur cohérent : roulement de 10 à 15 watts, vêtement jusqu’à 40 watts, densité d’air jusqu’à 15 watts. Selon les vitesses et les scénarios, on rejoint rapidement une facture globale de 60 à 70 watts entre 0°C et 15°C. Ce total n’est pas strictement proportionnel à la température, car certaines composantes, comme le roulement, deviennent nettement plus pénalisantes sous 5°C, lorsque les gommes et carcasses franchissent un seuil de rigidité.

Il faut aussi retenir que ces pertes ne s’expriment pas avec la même intensité à toutes les allures. À très basse vitesse, le roulement domine ; dès que l’on accélère, la traînée aérodynamique reprend le dessus, et les effets des vêtements et de la densité d’air deviennent la première ligne de coûts énergétiques. Cette hiérarchie évolutive explique pourquoi un même cycliste peut se sentir davantage « ralenti » en sortie rapide qu’en endurance de base, alors même que la température est identique.

Optimiser son matériel en hiver : pneus, chambres, pressions et textiles

Tout ne se compense pas, mais on peut réduire l’addition. Côté pneus, la priorité est de limiter les pertes internes. Des carcasses plus souples et des gommes au comportement prévisible dans le froid favorisent un Crr moins pénalisant. La cohérence pneu/chambre d’air ou pneu/montage tubeless compte également, car l’association conditionne la déformation et l’hystérésis à chaque rotation. Sans courir après une valeur unique, l’objectif est de préserver le « ressort » du système pour que le pneu travaille sans dissiper inutilement de l’énergie lorsque la température baisse.

La pression mérite d’être calibrée finement, mais elle ne suffit pas à compenser le durcissement des matériaux. Un réglage pertinent vise à maintenir l’empreinte au sol optimale pour la vitesse et la route du jour, sans basculer dans une surpression qui rigidifie le système, ni dans une sous-pression qui entretient la dissipation. L’hiver tolère moins les approximations : quelques essais comparatifs, toujours au même segment et à vitesse stabilisée, aident à valider un point d’équilibre.

Côté textile, le choix d’une veste technique stable dans le flux et correctement ajustée réduit la pénalité aérodynamique. Les tissus qui baillent ou qui plissent perturbent l’écoulement et coûtent des watts, surtout à vive allure. Il est pertinent d’adapter l’empilement de couches à l’intensité prévue : plus on roule vite, plus l’intérêt d’une enveloppe extérieure propre et compacte se confirme. L’idée n’est pas de s’exposer au froid, mais d’éviter d’ajouter de la traînée « gratuite » par un excès de volume ou un vêtement inadapté à l’effort et au vent relatif.

Lecture des données : ajuster ses attentes et ses objectifs

La principale vertu de ce test est de recadrer l’interprétation des données hivernales. Une baisse de vitesse à puissance égale n’est pas forcément le signe d’une forme en déclin. Elle reflète des watts réellement absorbés par le froid via le roulement, l’aérodynamique des vêtements et la densité de l’air. En pratique, cela invite à comparer des séances réalisées dans des conditions proches, et à raisonner en termes de puissance et de sensations plutôt qu’en vitesse pure lorsque l’hiver impose son empreinte sur la traînée.

Pour l’entraînement, cela signifie ajuster ses cibles de vitesse ou ses temps de passage, et accepter que certaines références estivales ne soient pas transposables. Cette rationalisation évite la surenchère d’effort pour « recoller » à une allure illusoire, génératrice de fatigue inutile. Elle permet aussi de mieux calibrer les journées d’intensité, où la veste et l’air froid font grimper la note aéro, et les sorties d’endurance, davantage sensibles au roulement.

Terrain vs soufflerie : ce que mesure Bike Speed Lab en conditions réelles

Le protocole Bike Speed Lab ne concurrence pas la soufflerie, il la complète. La soufflerie isole proprement l’influence d’un élément aéro dans un flux contrôlé, mais elle fige le vélo et gomme des phénomènes inhérents à la route. Les essais extérieurs captent les micro-oscillations du cycliste, l’irrégularité du vent réel et la dynamique du couple pneu/chaussée, qui changent dans le froid.

En multipliant rapidement les runs, on obtient une photographie fidèle du système cycliste + vélo dans le contexte d’usage, et une précision inférieure à 1 watt sur le roulement grâce à la répétabilité et à la qualité de l’instrumentation.

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Cette complémentarité est précieuse pour l’hiver. La tenue, par exemple, ne se résume pas à un CdA théorique : sa stabilité au vent relatif, la façon dont elle drape le corps en mouvement et l’interaction avec la position adoptée en extérieur déterminent la pénalité réelle. De la même manière, la réponse d’un pneu au froid ne se lit pas uniquement sur un rouleau, mais dans la réalité d’un bitume imparfait, avec des micro-variations d’appui et des contraintes latérales que le terrain impose.

Décryptage physique : comment le froid redistribue les coûts énergétiques

Sur route, la puissance à fournir compense des résistances distinctes : roulement, traînée aérodynamique et, à la marge en profil plat, composantes d’accélération et de dénivelé. La température n’affecte pas uniformément ces termes. L’hiver rigidifie les matériaux polymères comme les gommes et certaines carcasses, ce qui augmente l’hystérésis au point de contact. Parallèlement, la densité de l’air plus élevée accroît le terme de traînée, surtout dès que la vitesse s’élève, et la tenue hivernale augmente le CdA par ajout de volume et création de turbulences locales.

Cette redistribution explique l’asymétrie des sensations. À faible allure, le cycliste perçoit surtout le pneu qui « colle ». À rythme de seuil ou au-dessus, la tenue et la densité prennent le dessus, d’où l’impression d’un mur invisible quand on tente de maintenir la vitesse de l’été à puissance identique. La frontière des 5°C joue un rôle particulier : plusieurs matériaux franchissent une zone où leur module augmente nettement, ce qui peut faire « décoller » le coefficient de roulement de manière plus brutale qu’un simple gradient linéaire.

Bon sens opérationnel : optimiser ce qui compte, accepter l’incompressible

Il est illusoire de gommer totalement la pénalité hivernale. On ne change pas la densité de l’air et on ne déjoue pas la physique des polymères au froid. En revanche, on peut optimiser ce qui reste dans la main du cycliste. Du côté des pneus, privilégier une architecture souple et une association qui conserve du « ressort » quand il fait froid limite la hausse du Crr. Pour les textiles, choisir des coupes stables dans le flux, adaptées à l’intensité prévue, réduit l’addition aérodynamique sans compromettre la protection.

Cette approche pragmatique évite aussi les fausses bonnes idées. Chercher à retrouver la vitesse d’été à tout prix conduit à décaler l’entraînement et à accumuler de la fatigue. Mieux vaut accepter que l’hiver « coûte » des watts, et piloter ses objectifs à la puissance et à la sensation. Les enseignements du test terrain rendent cette posture plus sereine : la contre-performance apparente au compteur de vitesse n’est pas toujours une baisse de forme, mais l’expression de watts absorbés par l’environnement.

Ce que change le test terrain pour la performance hivernale

Ce test sur route clarifie une question cruciale : pourquoi suis-je moins performant en hiver à watts égaux ? Parce que le froid ajoute des résistances bien réelles. La part du roulement s’élargit quand les pneus se durcissent, les vêtements d’hiver renchérissent le CdA, et l’air plus dense pèse sur la traînée. L’addition atteint facilement 60 à 70 watts à 0°C, avec une accélération des effets dès 5°C. Plutôt que de lutter contre des lois physiques, le cycliste gagne à optimiser pneus et textiles, à calibrer finement ses réglages et, surtout, à lire ses données avec le prisme de la saison.

Au final, rouler vite en hiver demande plus d’énergie à vitesse égale. En intégrer les conséquences dans l’entraînement, l’analyse des sorties et le choix de matériel permet d’aborder la période froide sans malentendu sur la performance. La perte de watts à vélo en hiver n’est pas une fatalité à subir, mais un paramètre à mesurer, à comprendre et à piloter avec méthode.

FAQ – perte de watts à vélo en hiver

Combien de watts perd-on à vélo en hiver autour de 0°C ?

Le test terrain mené autour de 0°C montre une addition de résistances pouvant atteindre 60 à 70 watts par rapport à 15°C, à puissance produite identique.

Quelles sont les causes principales de la baisse de performance hivernale ?

Trois facteurs s’additionnent : le coefficient de roulement augmente avec des pneus durcis, l’aérodynamique des vêtements d’hiver dégrade le CdA, et l’air plus dense accroît la traînée.

Les vêtements d’hiver font perdre combien de watts selon le test ?

Selon la veste utilisée et la vitesse, l’impact mesuré peut atteindre jusqu’à 30 watts, même avec une position identique sur le vélo.

Les pneus expliquent quelle part de la perte de watts en hiver ?

À 45 km/h, l’écart de puissance lié au roulement entre 0°C et 15°C représente typiquement 10 à 15 watts, avec un effet qui s’accentue sous 5°C.

Pourquoi tester sur route avec Bike Speed Lab plutôt qu’en soufflerie ?

Le test terrain capture micro-oscillations, flux irréguliers et dynamique pneu/chaussée, permet un multitude de runs et une précision inférieure à 1 watt sur le roulement ; il complète la soufflerie.